Le portage salarial est une solution de plus en plus prisée par les travailleurs indépendants qui souhaitent bénéficier d’un statut sécurisé et d’une couverture sociale optimale. Cette alternative à l’auto-entrepreneuriat ou au travail en freelance s’est développée ces dernières années, mais son encadrement juridique reste encore peu connu. Afin de mieux comprendre le cadre légal du portage salarial, nous vous proposons un tour d’horizon complet des lois, conventions et réglementations en vigueur.
Origines et législation du portage salarial
Le concept de portage salarial est apparu en France dans les années 1980, il a connu un véritable essor depuis les années 2000. Le législateur français a souhaité reconnaître et encadrer cette pratique en constante évolution. La loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail a été la première à évoquer le portage salarial. Depuis lors, plusieurs textes législatifs et réglementaires ont contribué à structurer le cadre juridique de cette forme d’emploi.
L’ordonnance n°2015-380 du 2 avril 2015, relative au portage salarial, est venue préciser les contours de cette activité, notamment en définissant le triptyque contractuel qui la caractérise: un contrat commercial entre l’entreprise cliente et la société de portage, un contrat de travail entre le salarié porté et la société de portage, et une convention de prestation de services entre le salarié porté et l’entreprise cliente.
La loi n°2016-1088 du 8 août 2016, dite loi Travail ou loi El Khomri, a ratifié cette ordonnance et intégré les dispositions relatives au portage salarial dans le Code du travail. Elle a également prévu la conclusion d’une convention collective nationale spécifique au portage salarial, qui a été signée le 22 mars 2017 par les partenaires sociaux.
Les acteurs du portage salarial et leurs obligations
Dans le cadre légal du portage salarial, trois acteurs sont concernés : le salarié porté, la société de portage et l’entreprise cliente. Chacun d’entre eux a des droits et obligations spécifiques.
Le salarié porté, souvent un travailleur indépendant, doit posséder une réelle expertise dans son domaine d’activité. Il est responsable de la prospection de sa clientèle et de la négociation des conditions de sa prestation. Il bénéficie d’un contrat de travail en CDI ou en CDD avec la société de portage, qui lui assure une couverture sociale similaire à celle des autres salariés (assurance chômage, retraite, prévoyance).
La société de portage, quant à elle, doit être immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) et disposer d’une garantie financière auprès d’un établissement bancaire. Elle se charge de la gestion administrative et sociale du salarié porté, en lui versant un salaire et en assurant le paiement des cotisations sociales. La société de portage doit également mettre en place un comité d’entreprise (CE), ou une instance représentative du personnel (IRP) si elle compte plus de 50 salariés.
Enfin, l’entreprise cliente, qui fait appel aux services du salarié porté, a la responsabilité de vérifier que la société de portage respecte les obligations légales et réglementaires en matière de portage salarial. Elle doit veiller au respect des règles applicables en matière de durée du travail, de repos et d’hygiène.
Salaire, frais professionnels et formation : le cadre légal
Le salaire minimum perçu par le salarié porté est fixé par la convention collective nationale du portage salarial à 70% du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit environ 2 400 euros bruts par mois en 2021). Toutefois, il peut être ajusté à la hausse en fonction des négociations entre le salarié porté et la société de portage.
Les frais professionnels engagés par le salarié porté pour l’exercice de son activité peuvent être remboursés par la société de portage, sous réserve qu’ils soient justifiés et proportionnés. La convention collective prévoit également la possibilité de constituer un compte de frais professionnels ouvert au nom du salarié porté.
En matière de formation, le salarié porté bénéficie des mêmes droits que les autres salariés en termes d’accès à la formation professionnelle continue. Il peut ainsi accéder à des actions de formation, de bilan de compétences ou de Validation des acquis de l’expérience (VAE), financées par l’entreprise, l’Opco ou le CPF.
Conclusion : un cadre légal en constante évolution
Le cadre légal du portage salarial a connu une évolution significative ces dernières années, avec l’introduction de nouvelles dispositions législatives et réglementaires visant à sécuriser cette forme d’emploi et à garantir les droits des salariés portés. Toutefois, il reste encore des zones d’ombre et des incertitudes quant à certaines modalités pratiques, notamment en matière de responsabilité civile et sociale entre les différents acteurs.
Il est donc essentiel pour les travailleurs indépendants intéressés par le portage salarial de se tenir informés des évolutions législatives et jurisprudentielles, afin d’adapter leur pratique professionnelle et contractuelle aux exigences du droit en vigueur.